Biens classés, bien mieux protégés

Chaque année, de nouveaux biens sont classés par les autorités régionales. Ce qui implique des obligations mais aussi des droits pour les propriétaires.

Si le fait de classer un bien en vue de sa protection paraît une évidence aujourd’hui, il a fallu attendre 1931 pour voir un premier cadre légal organisant la protection du patrimoine immobilier en Belgique. A l’origine, pour être classé, un bien devrait présenter un intérêt national. La notion est désormais plus large et l’on peut parler d’intérêt historique, artistique, architectural, social … Les premiers biens à être protégés furent les églises et les châteaux. Là aussi les choses ont évolué : une école, une gare, un théâtre ou même une maison ouvrière peuvent faire l’objet d’un classement.

A l’origine également, on ne classait que certains éléments du bien (comme une porte, une cheminée, un vitrail, …). De nos jours, la tendance est de classer le bien dans son ensemble.

De matière fédérale, la protection du patrimoine est devenue régionale. Chaque région a sa politique, sa procédure, ses subventions,… Des différences existent, mais aussi quelques points communs.

La procédure de classement est assez semblable dans les trois régions. Elle se fait sur proposition des autorités régionales ou communales, du propriétaire, d’une association de sauvegarde du patrimoine, ou sur base d’une pétition. Les détails de cette procédure (délais, étapes, …) varient selon les régions.

Les effets du classement sont assez semblables également. Une fois le bien classé ou en voie de l’être, le propriétaire a certaines obligations. Il doit tout d’abord entretenir son bien. Ensuite, tout changement, exceptés quelques cas, implique une autorisation. Des permis doivent être introduits, comme d’ailleurs pour les travaux dans des biens non classés, avec des procédures parfois différentes. En Région de Bruxelles-Capitale, par exemple, le propriétaire doit introduire un permis d’urbanisme dit permis unique qui traite à la fois les problèmes liés à l’urbanisme et à la conservation du patrimoine. Une procédure d’urgence peut être demandée pour des travaux conservatoires qui doivent être effectués à brefs délias afin de garantir la préservation du bâtiment. En Flandre, pour certains travaux qui ne nécessitent pas de permis en règle générale, pour les biens classés, un avis de la cellule Monuments et Sites de la province concernée est nécessaire.

Les trois régions ont prévu des subventions pour l’entretien du bien classé et les travaux qui y seraient faits. Seuls certains travaux sont pris en compte. A Bruxelles, par exemple, les travaux de transformations sont exclus. Chaque région fixe ses taux de subvention qui peuvent varier fortement. A Bruxelles, pour les bénéficiaires publics le taux de subvention est fixé à 80%, TVA et honoraires d’architecte compris. Pour les privés, le taux de subvention est de 40%. Mais il peut être plus élevé dans certains cas : faibles revenus, immeuble fortement dégradé, restitution d’éléments disparus présentant un intérêt, …

En région wallonne, le montant de l’aide se chiffre à 60% du coût des travaux auxquels s’ajoutent les frais généraux, la TVA et l’intervention de la province et de la commune où se situe le bien. Précisons que, conformément au Code wallon de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et du patrimoine, la province et la commune où se situe le bien sont tenues de participer financièrement aux travaux subsidiés. Ce chiffre grimpe à 80%, par exemple, si la destination principale du monument est reconnue d’intérêt collectif; 95% si le bien figure sur la liste du patrimoine exceptionnel de Wallonie. La région prévoit aussi une aide pour les travaux préventifs ou curatifs à entreprendre d’urgence. Celle-ci est de 60% du montant des travaux avec un maximum de 6.000€ hors TVA par année.

En Flandre, l’intervention, répartie entre la Région, la province et la commune, dépend aussi du type de propriétaire (privé-public), de la destination du bien (biens collectif ou non, ouvert au public), …

Des avantages fiscaux sont aussi accordés aux propriétaires. Les trois régions ont prévu une déduction des revenus imposables de certains frais occasionnés pour l’entretien et la restauration du bien. Précisons qu’à Bruxelles, les biens classés ou en voie de l’être sont exonérés du précompte immobilier, dans une certaine mesure (qui varie de 25 à 100%) et à certaines conditions (logement non donné en location, équipement scolaire, culturel … et ouvert minimum un jour par an au public).

Quant aux sanctions vis-à-vis des propriétaires qui n’entretiendraient pas leur bien ou y réaliseraient des travaux sans autorisations, si elles existent, elles sont rarement appliquées.  » Mais des contrôles sont régulièrement opérés », nous assure-t-on à la Région wallonne.

Des biens estimés exceptionnels

Plusieurs biens belges sur la liste de l’Unesco.

La liste du patrimoine mondial comporte 890 biens constituant le patrimoine culturel et naturel considéré comme ayant une valeur universelle exceptionnelle. Cette Liste comprend 689 biens culturels, 176 naturels et 25 mixtes répartis dans 148 états. Depuis avril 2009, 186 Etats parties ont ratifié la Convention du patrimoine mondial.

La Belgique n’est pas en reste. En région de Bruxelles-Capitale, trois biens ou ensembles sont repris sur la liste : la Grand-Place, le Palais Stoclet et quatre maisons de l’architecte Victor Horta. « Trois biens sont inscrits sur la liste indicative« , nous précise-t-on aux Monuments et Sites. « Cela signifie qu’ils sont proposés pour être sur la liste définitive. Nous attendons une décision. Il s’agit du Palais de Justice, des Galeries Royales Saint-Hubert et de la Villa Bloemenwerf d’Henry van de Velde« .

Côté wallon, les quatre ascenseurs du canal du Centre et leur site, la Cathédrale Notre-Dame de Tournai et les Ministères néolithiques de silex de Spiennes (Mons) sont repris sur la liste.

Une demande a été introduite pour le champ de bataille de Waterloo, le palais des Princes Evêques à Liège, les sites miniers majeurs de Wallonie ou encore l’ensemble thermal de Spa. En outre, quelque 159 biens sont repris dans la Liste du patrimoine exceptionnel de la région wallonne, révisée tous les trois ans.

En Flandre, l’Unesco reprend sur sa liste des béguinages et beffrois, le centre historique de Bruges et plus récemment le complexe Maison-Ateliers-Musée Plantin-Moretus à Anvers. Le gouvernement flamand a introduit une demande pour le noyau historique d’Anvers (de l’Escaut aux anciens remparts de vers 1250), les bâtiments universitaires de Louvain, le noyau historique médiéval ou la « Cuve » de Gand et les deux abbayes qui sont à son origine, les lieux de mémoire et monuments de la Grande Guerre (Westhoek et régions voisines »).

Chiffres

La Région de Bruxelles-Capitale a pris 1.164 arrêtés de classement, ce qui représente 3.000 et 3.500 biens; en Région wallonne, le nombre de biens classés s’élève à 3.342; en Flandre, on est 12.305. « Chaque région et chaque pays a sa politique« , nous explique-t-on aux Monuments et Sites à Bruxelles. « Nous avons tendance à limiter le classement et à nous concentrer sur les biens qui ont une réelle valeur ».

Budget – Financement

En 2008, les moyens consacrés par la Région de Bruxelles-Capitale s’élevaient à 16.337.000 d’euros, dont 12.558.252 ont été consacrés à la restauration du patrimoine immobilier.

Le Parlement wallon a adopté, fin 2009, le budget 2010 pour le Département du Patrimoine qui s’élève à près de 40 millions d’euros. « Plus de 60% du budget est consacré aux travaux de restauration et d’entretien des biens classés mais aussi aux travaux de restauration et de valorisation du Petit Patrimoine Populaire Wallon », précise-t-on à la Région.

Du côté de la Flandre, quelque 45,4 millions d’euros ont été prévus en 2010 pour les primes de restaurations et 6,3 millions d’euros pour l’entretien.