Les droits du bailleur

Le preneur doit bien entendu exécuter lui aussi ses obligations, par exemple, le paiement du loyer, l’entretien de l’immeuble, etc …

Toutes ces obligations correspondent à des droits dont bénéficient naturellement le bailleur. Le bailleur a le droit de percevoir le loyer, d’exiger que l’immeuble soit bien entretenu, etc …

Le bailleur dispose, en outre, de certains droits bien spécifiques et qui ne correspondent pas à des obligations du preneur.

Ainsi, le bailleur a le droit de :

1. visiter les lieux loués,

2. effectuer les réparations urgentes,

3. exercer son privilège sur les meubles du preneur,

4. vendre le bien loué

1. Le bailleur a le droit de visiter les lieux loués

Comme nous l’avons déjà expliqué, le bailleur ne peut pas pénétrer constamment dans l’immeuble loué sous divers prétextes.

Cependant, s’il a un motif légitime de visiter l’immeuble, il dispose d’un droit de visite, sans pour autant pouvoir user de ce droit de façon intempestive.

On peut citer comme exemples de motifs légitimes :

– le fait de pénétrer dans l’immeuble pour s’assurer que le preneur l’entretient correctement;

– le fait également de visiter l’immeuble lorsque des réparations sont demandées par le locataire ou si des réparations urgentes sont à effectuer;

– la nécessité de faire visiter l’immeuble en fin de bail par les futurs locataires, etc …

Mais attention, le bailleur ne pourra pénétrer dans l’immeuble qu’avec l’accord du locataire. S’il pénétrait en l’absence de ce dernier ou sans son accord, il pourrait être accusé de violation de domicile.

Si le preneur refuse l’accès de l’immeuble, le propriétaire devra le citer devant le juge de paix.

2. Le bailleur a le droit d’effectuer les réparations urgentes

a. Principe

Le Code civil reconnaît expressément au bailleur le droit d’effectuer dans l’immeuble loué les réparations urgentes.

Il faut un caractère d’urgence.

Ceci exclut la possibilité pour le bailleur de réaliser des travaux d’aménagements ou de transformations ne présentant aucune urgence.

Il s’agit ici des travaux nécessaires sans lesquels le preneur ne pourrait pas jouir normalement du bien loué ou sans lesquels le bien se dégraderait.

Le Code civil précise en outre que le preneur est obligé de les supporter mais :

– si ces réparations durent plus de 40 jours, le preneur a le droit de demander une diminution de loyer « … en proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé…« ,

– si les réparations sont de telle nature qu’elles rendent le bien inhabitable, le preneur a le droit de demander la résiliation du bail.

b. Le bailleur peut-il prévoir une clause contraire dans le bail ?

Le bailleur a le droit d‘insérer dans le bail une clause aux termes de laquelle, même si les réparations durent plus de 40 jours, le preneur doit les supporter sans pouvoir demander d’indemnité. Une telle clause ne peut cependant pas faire obstacle à une demande de résiliation du bail par le preneur si l’immeuble est rendu inhabitable.

3. Le privilège du bailleur

Le bailleur dispose d’un privilège sur tout ce qui garnit l’immeuble loué.

Ceci signifie que le bailleur dispose du droit d’être préféré aux autres créanciers du locataire pour certaines créances.

C’est ainsi que, même si une saisie a déjà été pratiquée par quelqu’un d’autre, la créance du bailleur primera celle des autres créanciers.

a. Quelles sont les créances pour lesquelles le bailleur est privilégié ?

Ce sont toutes les sommes dues par le locataire et qui découlent directement du bail. Il s’agit donc des loyers, des indemnités pour dégâts locatifs, des sommes devant êtres payées à titre de charges, etc …

Pour les loyers, le privilège ne pourra cependant s’exercer que sur ceux dus pour l’année en cours et ceux dus pour les deux années précédentes. Si le bail a date certaine (le bail a date certaine s’il a été enregistré ou si l’une des parties au contrat est décédée, ou si la substance du bail a été constatée dans un acte dressé par un officier public, telle une citation en justice, par exemple), le privilège pourra, en outre, s’exercer sur tous les loyers à échoir.

b. Sur quels biens le bailleur peut-il exercer son privilège ?

Sur tous les meubles qui garnissent l’immeuble loué et qui servent au logement du preneur. Ainsi, le bailleur ne pourra pas exercer son privilège sur les vêtements (fourrures par exemple) ou bijoux du preneur. Il ne faut pas non plus que les meubles garnissant l’immeuble loué appartiennent à quelqu’un d’autre que le preneur.

Il a cependant été jugé que le privilège du bailleur sur les meubles se trouvant dans les lieux loués reste intact dès lors qu’il n’est pas prouvé que le bailleur savait que ces meubles n’étaient pas la propriété de son locataire.

Jugé que  » … des écrits qui établiraient la réalité du droit de propriété d’un tiers sur de tels meubles sont impuissants à rendre ce droit opposable au bailleur s’il n’est pas prouvé que le bailleur connaissait avant la saisie le droit du tiers« .

c. Comment en pratique, le bailleur peut-il agir pour exercer son privilège ?

Le bailleur pourra exercer son privilège grâce au système des saisies conservatoires.

Trois espèces de saisies conservatoires peuvent être pratiquées par le bailleur :

– la saisie-gagerie,

– la saisie mobilière conservatoire,

– la saisie revendication.

a) La saisie-gagerie

La saisie-gagerie permet au bailleur de saisir les meubles du preneur sans la permission préalable du juge.

Pour opérer une saisie-gagerie, le bailleur devra s’adresser à un huissier de justice. L’huissier de justice se rendra chez le preneur et lui remettra un « commandement » de payer son dû..

Le preneur dispose à ce moment d’un délai de 24 heures pour s’acquitter de sa dette. S’il ne le fait pas, au terme des 24 heures, l’huissier de justice pourra saisir le mobilier.

Cette saisie présente l’inconvénient de supprimer l’effet de surprise sur le preneur puisqu’il a été prévenu un jour d’avance.

b) La saisie mobilière conservatoire

La saisie mobilière conservatoire doit être demandée par requête (signée obligatoirement par un avocat) au juge des saisies.

Ce système-ci semble préférable car il ménage l’effet de surprise. En effet, il n’y a pas de commandement de payer 24 heures avant la saisie comme pour la saisie-gagerie. Le preneur non averti ne risque pas de transporter ses meubles ailleurs comme il pourrait le faire dans le cas de la saisie-gagerie qui lui laisse ce délai de 24 heures.

Cette procédure est cependant moins rapide dès lors qu’elle nécessite l’obtention d’une décision judiciaire.

c) La saisie-revendication

Le bailleur pourra opérer une saisie-revendication lorsque, le preneur ayant subrepticement déménagé ses meubles, il se trouve devant un immeuble vide.

Cette saisie-revendication doit également, tout comme la saisie mobilière conservatoire, être demandée au juge des saisies par requête signée obligatoirement par un avocat.

En pratique, bien sûr, il faudra connaître l’endroit où le preneur aura fait transporter ses meubles, ce qui n’est pas toujours aisé, d’autant plus que pour conserver le privilège, la saisie doit être pratiquée dans les quinze jours du déplacement.

d) Citation devant le juge

Le bailleur devra citer le preneur devant le juge de paix compétent (celui du canton où est situé l’immeuble loué) en paiement des sommes dues et demander à l’huissier que la saisie conservatoire soit transformée en saisie exécution, pour que le bailleur reçoive l’autorisation de vendre les meubles et se payer son dû sur le produit de la vente.

e) Mais, prudence tout de même !

Les saisies, et surtout la saisie-gagerie, doivent être maniées avec prudence.

Le bailleur agirait abusivement par exemple s’il pratiquait une saisie-gagerie sur les meubles d’un locataire qui payerait une fois son loyer en retard. La réputation du locataire risque d’être gravement compromis et le locataire pourrait demander des dommages et intérêts important au bailleur qui aurait agi ainsi de façon abusive.

Les procédures de saisie son assez onéreuses et il ne faut les pratiquer que si la créance est réellement en péril et surtout si le locataire possède des meubles de valeur suffisante.

Signalons, également que tout bien ou créance appartenant à un débiteur quelconque peut faire l’objet d’une saisie.

Exemple : compte en banque, voiture, salaire, etc.

Le bailleur ne bénéficie cependant d’aucun privilège sur ces biens.

4. Le bailleur a le droit de vendre l’immeuble loué

Si ce droit semble évident, il nous a cependant paru utile d’en faire mention parce que la question est souvent posée.

Le sort du locataire, dans ce cas, sera différent selon la destination du bail.

En cas de vente, le locataire devrai laisser visiter le bien par les candidats acquéreurs, soit à des moments à convenir de commun accord, soit conformément à l’usage des lieux, soit bien entendu suivant ce qui est indiqué dans le bail.